texte d’Yves Ottogali, photos Spotair
Le 6 mai dernier, Spot’Air a eu le privilège d’être accueilli, sur la base 118 « Colonel Rozanoff » de Mont de Marsan. Nous répondions à l’invitation du Régiment de Chasse 2/30 Normandie Niémen, familièrement appelé le « Neu-Neu ».
Nous ne pouvons évoquer ce régiment sans faire un rapide rappel historique.
Unité des Forces Aériennes Françaises Libres (FAFL), le GC III « Normandie » se destine dès l’origine à combattre sur le front de l’Est. Les premiers volontaires du Normandie se rassemblent sur la base de Rayak au Liban. Cela deviendra l’indicatif radio de l’unité ! Ils rejoindront en novembre 1942 Ivanovo au Nord Est de Moscou. Le choix des pilotes se porte alors sur le chasseur de Yakovlev Yak 1. Le groupe Normandie est engagé au front pour sa première campagne dès mars 1943.
C’est au cours de leur retraite hivernale de février 1944 à Toula, que le groupe Normandie devient un Régiment doté de 4 escadrilles. Il est rééquipé de Yak 3 au début de l’automne. Lors de la deuxième campagne menée en 1944, Staline décerne le titre de « Niémen » à l’unité Française pour sa participation aux batailles du fleuve Niémen. La troisième campagne a lieu de janvier à mai 1945. Elle voit le régiment « Normandie-Niemen » accompagner les Russes dans leur marche pour Berlin.




UN REGIMENT MYTHIQUE
De retour en France, en jin 1945, le régiment est autorisé à conserver ses Yak 3 en reconnaissance des sacrifices accomplis et des succès remportés. Avec plus de 270 victoires, le Neu-Neu se plaçait en tête des unités de chasse françaises.
Par la suite, le « Neu-Neu » (devenu GC II/6) mis le cap vers le Maroc, sur Mosquito. Puis il rejoindra l’Indochine jusqu’en 1951. Il est alors équipé de P63C et F6F. On le retrouve sur F-47 et Mistral à Oran jusqu’en 1960. Après dissolution de la 6e escadre, l’escadron rejoint la 30e escadre et gagne Reims. C’est alors la chasse tout temps jusqu’en 1973 sur Vautour II N. Puis viendra l’époque sur Mirage F1 toujours à Reims et Colmar jusqu’en 2009. Cette année là, c’est la mise en sommeil de l’escadron.
La réactivation sur Rafale aux couleurs du 2/30 « Normandie-Niemen » a lieu en août 2011 sur la base aérienne de Mont-de-Marsan. La mise en service opérationnel se fera en 2012, année des 70 ans du Neu-Neu !





AMBIANCE VISITE
Nous voici, une quinzaine de membres de Spot’Air, regroupés en ce début d’après-midi devant l’entrée de la base. La chargée de communication de la base nous accueille. Une fois les formalités accomplies, nous rejoignons les locaux du « Neu-Neu ». C’est la que nous attend le Capitaine D. Il sera notre hôte pour la visite. Les recommandations d’usages étant faites, nous nous rendons directement aux parkings avions où nous plongeons immédiatement dans l’ambiance opérationnelle. Les mises en route des Rafales s’enchaînent et, une à une, les machines prennent vie. Au bruit sourd des démarrages, succède le sifflement caractéristique des moteurs M88. Déjà, les roulages commencent.
Nous prenons alors place sur la « butte » située entre les aires de stationnement avions et la piste. C’est l’endroit idéal pour observer les mouvements avions. De plus la météo est de la partie. La butte devient difficile à escalader pour certains d’entre nous … mais la motivation est là ! A peine installés, les décollages se succèdent. Nous apprenons que les pilotes ont été briefés afin de nous gratifier de remises de gaz. Et en effet, nous sommes gâtés ! Entre les départs et retours de missions qui s’enchaînent, une surprise nous attend. Un magnifique Mirage 2000 B de l’EC 2/3 Champagne (un ex de l’ EC 2/5 Île-de-France) se pose devant nous. Un peu plus tard, un tout aussi magnifique Mirage 2000 D de l’escadron 1/30 Côte d’Argent décolle.





TOUR D’HORIZON DU « NEU –NEU » AUJOURD’HUI
Le calme relatif entre départ et retour de mission, nous donne l’occasion d’un échange des plus intéressants avec la Capitaine D. qui nous expose que depuis sa réactivation, le régiment sous tension participe à de nombreuses missions et déploiements (Serval, Chammal…).
Actuellement, ce sont les missions de police du ciel menées lors de déploiements en Lituanie. Ces missions sont très exigeantes pour les pilotes, qui évoluent dans un contexte tendu. Il arrive que les systèmes sol-air S-300 positionnés dans l’enclave Russe de Kaliningrad « éclairent » les Rafale dès leur décollage. Les décollages sur alerte « scrambles » et les rencontres avec les appareils russes, qui volent souvent sans plan de vol ni transpondeur, sont fréquents.
Le Capitaine D. nous rappelle que les Rafale B et C équipent le régiment. La particularité actuelle est qu’il possède aussi des Rafale Marine !



DES RAFALES M AU « NEU-NEU » ? KEZAKO
Effectivement, nous comptons 4 Rafale M présents sur la base. Ce sont des petits numéros. Nous apprenons que le régiment a cédé certains de ses Rafale B à la 4e E/C basée à Saint Dizier qui, de par ses missions intrinsèques, a un grand besoin de biplaces. En contrepartie, cette dernière a remis au « Neu-Neu » des Rafales M qu’elle avait reçue de la Marine ! Voici un exemple singulier de gestion des ressources inter-armes, que l’on pourrait appeler le système D…
Même si le passage sur Rafale M se fait sans difficulté particulière, le Capitaine D. indique cependant que l’atterrissage nécessite une certaine adaptation. L’arrondi est limité en comparaison du Rafale Air. Il donne presque l’impression d’un posé 3 points !
L’activité aérienne étant moins dense, c’est le moment des questions qui fusent de la part des membres de Spot’Air : Les douilles ça sort par où ? Ca sort par le trou qui est là. Où là ? Bon, le mieux est de faire un tour. Nous voici donc autour d’un Rafale Air puis M.



UN PEU DE TECHNIQUE
Parmi les systèmes communs à ces versions, le Capitaine D. revient en particulier sur l’Optronique Secteur Frontal (OSF) situé sur le nez de l’avion. C’est un capteur passif qui complète l’usage du radar. L’OSF se compose d’une voie TV et télémétrie pour l’identification visuelle des cibles, et d’une voie infrarouge, l’IRST (en forme de boule, c’est en fait un capteur de chaleur qui balaie le ciel). Le standard F4 dispose d’un nouvel IRST qui est un vrai plus dans la détection passive de cibles.
Sur le rafale M quelques différences notables attirent notre attention. Bien sûr l’échelle pilote escamotable (pas facile à utiliser…), mais aussi, son train d’atterrissage renforcé, et en particulier son train avant qui lui confère une assiette à cabrer.
Egalement, le M dispose d’un vide vite dédié aux réservoirs internes, permettant d’alléger la masse avion si un retour d’urgence sur le PA est nécessaire.
Autre particularité, l’alignement en continue des centrales inertielles de navigation en fonction du déplacement du PA.



CLAP DE FIN
Un échange passionné s’ensuit, par moment couvert par les PC enclenchées lors de remises de gaz, ou du bruit strident des M88 lorsque les Rafale passent à proximité rejoindre leurs abris. Mais c’est déjà le moment de nous quitter. Et c’est un peu à reculons que nous quittons ce régiment emblématique et ses beaux Rafale ! Par ailleurs, la météo se gâte et un orage se dessine comme pour nous rappeler que c’est l’heure …
Milles merci aux personnels de la base 118 de Mont de Marsan et du Régiment de Chasse 2/30 Normandie Niémen pour avoir rendu possible cette visite de notre association Spot’Air. Un merci particulier au Capitaine D. pour la qualité de son accueil tout au long de cet après-midi et de sa disponibilité à partager ses connaissances et à répondre à nos nombreuses questions.
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