Seattle

texte et photos de Vincent Houssais                                       

Séjour dans la région de Seattle patrie historique de Boeing.

En mai 2023, j’ai eu la chance de me rendre dans l’extrême nord-ouest des Etats-Unis, et plus particulièrement dans la région de Seattle. J’ai pu visiter cette magnifique région de l’État de Washington, à ne pas confondre avec la capitale du même nom. Cette dernière se situe à l’Est du pays dans le District of Columbia.

Une ville de l’aéronautique

Le point commun entre ces deux villes, situées à l’opposé l’une de l’autre du territoire Américain, est de posséder, selon moi, les deux plus beaux musées aéronautiques du pays. Bien évidemment, ceux de l’USAF à Dayton dans l’Ohio et de l’US NAVY à Pensacola en Floride ne sont pas en reste. En effet, le « Smithsonian » de Washington, scindé en deux musées distincts, l’un situé sur le Mall en plein cœur de la capitale fédérale, et l’autre aux abords de l’aéroport international de Dulles ne sont plus à présenter. La richesse de leurs collections, que ce soit civiles ou militaires est impressionante. Seattle n’a rien à envier à Washington DC. En effet, elle possède un lieu exceptionnel avec son « Museum of Flight ». Grâce à son principal mécène, la société Boeing, il peut afficher une magnifique collection d’aéronefs unique au monde.

Seattle la ville aux quatre aéroports entre mer et montagnes

Après une escale à Londres, mon vol British Airways m’a convoyé jusqu’à Seattle à bord d’un Boeing 787-10. Air France ou Air Tahiti Nui, l’utilisent aussi cet avion, en version 8 ou 9 sur cette destination au départ de Paris ou de Papeete. Seattle et sa proche banlieue comptent 4 aéroports.

Tacoma Airport

Tacoma airport est la principale plateforme internationale. Située au sud de la ville, elle accueille les principales compagnies majors du monde entier. Mais c’est aussi un hub très important de la compagnie Alaska Airlines qui sillonne la région.

King County International airport

King County International airport se positionne au nord des installations de celui de Tacoma, dans le même axe. Il est plus spécialisé dans l’aviation d’affaire et le fret. Surtout, il est le siège historique de Boeing. Il héberge de nombreux sites de construction de l’avionneur, qui y assemble notamment le si décrié 737 Max. C’est ici également qu’on trouve le fameux « Museum of Flight ».


Renton Municipal Airport

A quelques encablures à l’Est, se situe « Renton Municipal Airport ». La piste donne directement sur un bras de mer, si caractéristique de cette cité lacustre. Ici le Pacifique s’immisce partout dans les terres, à l’instar de sa voisine Canadienne Vancouver. Cette particularité, facilite l’accès aux nombreux hydravions qui y séjournent. Au même titre, de nombreuses sociétés liées à ce secteur y sont implantées. C’est aussi un autre site de construction pour la société Boeing. Elle y possède également de nombreux halls d’assemblage pour le 737 Max. Renton dispose d’une unique piste de 1640 mètres. Elle est largement suffisante pour faire décoller un 737 dans une configuration minimum en kérosène. C’est l’occasion de faire un saut de puce jusqu’à sa voisine King County toute proche avec ses 3 km de bitume.

Everett et sa méga factory Boeing

Quatrième et plus récente plateforme aéroportuaire, située à quelques dizaines de kilomètres au nord de Seattle, se trouve l’aéroport d’Everett Paine Field. C’est ici que la société Boeing s’est implantée dans les années 60. Elle y construisit, à coups de bulldozers et dans une immense forêt dense, sa méga « factory ». Ce fut pour y assembler son mythique Super Jumbo 747. De nombreuses entreprises sous-traitantes de Boeing y résident. Ce fut le lieu de construction principal des gros porteurs de la marque Américaine comme le 747. Ce dernier n’est plus au catalogue mais dont le dernier exemplaire en version cargo a été délivré récemment.

Du 747 au 787

Le Boeing 787 Dreamliner, mais surtout le Boeing 777-9, ayant pris la suite de l’emblématique jumbo jet, non pas sans certaines difficultés industrielles, fleurissent les parkings adjacents dans leurs robes vertes, attendant soit leurs moteurs, soit leur livrée définitive.

mais aussi du 767

Il est à noter également, que le Boeing 767 en version cargo, est toujours en production. Air Tanzania reçoit récemment des exemplaires de ce modèle. Ce dernier, servant de plate-forme également au ravitailleur KC-46, avec ses problèmes récurrents, fait la une de l’actualité. Au même titre le reste de la production s’englue dans d’innombrables difficultés industrielles, de management et de contrôles qualités. Ils font regretter amèrement à l’USAF de ne pas avoir choisi à l’époque son performant concurrent l’Airbus A330-MRTT.

Du militaire aussi

Cependant, la montée en puissance de la production du KC-46 va en s’accélérant malgré ces obstacles. Le constructeur les règlent au fil de l’eau. Pour preuve, il faut voir la quantité impressionnante en mai 2023 de ces ravitailleurs sur le tarmac. On les trouve aussi bien sur le site d’Everett que celui de King County, site où est implanté le Boeing Military Delivery. J’ai eu la chance de voir un des rares exemplaires destiné à la JASDF Nippone. C’est leseul pays avec les Israëliens et en dehors des USA à avoir choisi ce ravitailleur. L’Aeronautica Militare ayant fait marche arrière récemment au profit de l’A330.

Le musée « Boeing Future of flight »

Le site d’Everett héberge également le musée « Boeing Future of flight ». C’est la porte d’entrée pour la visite de l’usine Boeing. Elle se fait uniquement sur réservation à l’instar de ce qui se fait sur le site d’Airbus à Toulouse avec le musée Aeroscopia et sa boutique.

Le « Boeing Everett Factory Tour » vous coûtera au tarif plein 38$, les employés de Boeing disposent d’une réduction de 18$. Je pense que si vous dites que vous travaillez chez Airbus, le tarif sera de 56$ logiquement ! La visite ne peut se faire que du jeudi au lundi. Comme dans l’hexagone, pas d’appareils photos. Après une présentation de quelques minutes, dans une salle de cinéma, d’un reportage sur les activités de Boeing et du déroulé de la visite, vous monterez dans un bus. Il vous emmènera vers le principal hall d’assemblage. Ce fameux hangar, aux dimensions impressionnantes a le record du monde du plus grand volume. Il fait 13 millions de m3 avec la plus grande surface de près de 400 000 m². Il aurait la particularité, de par sa hauteur sous plafond, de générer des nuages. Mais je vous avoue, je n’en ai pas vu.

Les équipes au travail

Un souterrain interminable que l’on a emprunté, permet de passer à pieds sous l’usine. Il permet de rejoindre une plate-forme qui domine le site de production. Vous apercevez les compagnons qui travaillent souvent en musique, sur des 777 ou des 787. Si vous êtes à l’aise avec la langue de Shakespeare, vous pourrez poser au guide toutes les questions qui vous taraudent. Bien sûr, il faut en éviter évidemment les sujets qui fâchent. Ensuite, vous rejoignez votre bus, sans avoir omis de reprendre ce surprenant tunnel, pour une visite des parkings avions.

Une chose m’a interpellé par rapport aux sites de Toulouse et de Saint-Nazaire. J’avais eu l’occasion de visiter il y a quelques années. Ici,les employés de Boeing viennent jusqu’aux pieds des hangars avec leur voiture formant d’immenses parkings. Peu de vélos, si ce n’est dans le tunnel et aucun bus pour le personnel. On est vraiment dans un pays ou l’automobile fait partie du paysage.
En terminant la visite, vous pourrez visiter le musée. Il possède des pièces intéressantes. Et sa terrasse, avec une vue imprenable sur la piste, permet de faire d’excellentes photos.

Un site aux multiples facettes

À noter, le site de Boeing d’Everett possède une particularité au niveau logistique. Ici, les pièces d’avions n’arrivent pas que par la route ou par les airs, comme avec le dreamlifter, mais aussi par la voie ferrée. En effet, on peut apercevoir des trains entiers remplis de cellules de Boeing 737 dans leur livrée verte jouxtant les hangars. Ils sont en provenance directe de l’usine Boeing de Wichita dans le Kansas à l’autre bout du pays.

A côté du musée, devant le parking, une longue butte accessible librement, permet également de prendre des photos avec une focale de 300 mm minimum. Les mouvements d’avions sont aléatoires, mais en semaine, beaucoup de training ou de deliveries avec souvent des perles rares. J’ai eu l’occasion de voir, lors de mon passage, un Antonov124 mais aussi un 747 Dreamlifter, dont une base logistique est située près de là.

Un autre musée se situe autour de l’enceinte de l’aéroport. C’est le «Flying Heritage and Combat armor». Il est ouvert au public à certaines périodes uniquement. Il expose des aéronefs et autres blindés en rapport avec la seconde guerre mondiale notamment.
En ce qui concerne l’hébergement, je résidais à côté d’Everett, à Mukilteo où les tarifs sont nettement moins chers qu’à Seattle. Everett a été construite entre la côte Pacifique et d’immenses forêts de conifères.
Vous êtes en plein milieu de la nature à l’état pure, sur un rivage très sauvage. De nombreux ferries peuvent vous emmener sur de nombreuses îles toutes proches, aux confins du Canada et de son emblématique ville de Vancouver qui n’est qu’à 2h de route.


The Museum of flight un musée chez Boeing

On ne peut terminer ce séjour, sans avoir fait une visite du « Museum of flight ». Situé à l’ouest des installations de King County. Il a été créé en 1965, comme l’auteur de ces lignes, et du C-130H Néo-Zélandais, pour ceux qui auraient suivi par hasard mon précédent article sur Wanaka.
Plus grand musée privé aéronautique au monde, il attire plus de 500 000 visiteurs par an. Il rassemble une collection unique d’aéronefs et d’enginsspatiaux. Cela va de la conquête de l’air et de l’espace, en passant par la 1ère guerre mondiale. Il possède avec un remarquable secteur consacré à l’aviation Française. Vous trouverez aussi de nombreux prototypes créés par les Etats-Unis que ce soit dans les domaines civil ou militaire. L’influence de Boeing y est évidente, de par son mécénat, mais pas seulement.

Vous pouvez y voir, par exemple, un Concorde de British Airways le G-BOAG. On peut noter au passage que le Smithsonian de Washington n’est pas en reste avec son Concorde d’Air France.

Le plein d’avions exceptionnels

La pièce maîtresse de cette exposition est sans nul doute cet exemplaire du Boeing Model 80A-1 dans sa magnifique livrée verte et grise. Elle nous rappelle qu’à la fin des années 20, Boeing rivalisait avec Fokker ou Ford dans le début de l’ère du transport commercial.
Ce trimoteur transportait jusqu’à 12 passagers dans un confort exceptionnel pour l’époque.

Parois en acajou, fauteuils en cuir, eau chaude dans les toilettes et même des lampes de lecture individuelles.

On peut y voir également le prototype du Boeing 747 le N-7470 « City of Everett ».
La particularité de cet exemplaire est d’avoir servi de banc d’essai pour une version ravitailleur en vol. Version qui fût hélas abandonnée au profit du KC-10 de Mc Donnell Douglas que l’USAF s’empressa de commander, ainsi que les Néerlandais. Avec un peu d’imagination, on aurait vu voler des KC-47 en lieu et place du Douglas.

Air Force One au rendez-vous

Un exemplaire d’Air Force One trône également Ce fut le 1er jet Présidentiel, dans sa version des années 60, sur la base du Boeing 707, VC-137B SAM-6970. Il est possible d’y voir l’intérieur VIP, plutôt vintage à notre époque.

Le prototype du Boeing 737-100 dans sa magnifique livrée aux couleurs de la NASA, son dernier opérateur est également visible. Vous pourrez admirer également un des prototypes du Boeing 787-8 le N787BX.

Le temps s’est arrêté

Un rare Douglas DC-2 ainsi que le prototype du Boeing 727-100 aux couleurs originales de United feront l’admiration des passionnés.
Une partie du musée, reprend les bâtiments d’origine de l’usine, la Boeing Airplane Company que créa William Boeing avec son associé George Westervelt en 1916. L’intérieur est agencé comme à l’époque, avec beaucoup de bois et de toiles pour fabriquer l’hydravion Model C commandé par la Navy en 1917. Autour, de vieilles machines-outils, faisant de ce lieu un endroit très particulier. Le temps semble s’être figé dans les années 20.

Un spectacle de tous les instants

Devant le musée, sur la pelouse le séparant de l’unique piste du King County airport, trône un magnifique Lockheed L-1049G Constellation de l’ex compagnie Trans-Canada Air Lines. À cet emplacement, vous avez une vue imprenable sur le seuil de piste. Vous aurez peut-être la chance de voir atterrir un exemplaire du 777-9 en training. Cerise sur le gâteau, j’ai même eu le privilège, lors de ma visite, d’assister au décollage de 6 F/A-18 Hornet des Red Devils du VMFA-232 de la Marine Corps Air Station, et basés à Miramar en Californie. Ces derniers étaienten escale technique au retour d’un exercice tactique en Alaska.

Et des parkings immenses

Autour du site de King County, à l’instar de ceux d’Everett ou de Renton, vous verrez d’immenses parking avions où s’entassent des dizaines d’appareils en attente de livraison. Lors de mon passage, en mai 2023, beaucoup de 737 Max aux couleurs Asiatiques notamment, attendaient leurs livraisons. Il faut dire qu’à l’époque les autorités de régulation de l’aviation civile Chinoise n’avait pas encore certifié les modifications sur le 737 Max, situation créant ainsi un certain « embouteillage ».


De l’océan à la montagne, nature et technologie

Pour résumer mon séjour en quelques mots, Seattle est une ville qui allie la modernité et la technologie grâce à ses entreprises emblématiques comme Microsoft ou Boeing.

Son ouverture sur le Pacifique est une porte d’entrée sur l’Asie. Son melting-pot de population une richesse, et son environnement sauvage entre océan et montagne, sont des atouts inestimables. Ici, vous vous sentirez à l’aise loin des clichés sur les mégalopoles Américaines.
En France, nous avons la ville rose, capitale de l’aéronautique, aux USA, il y a Jet City, la cité émeraude à taille humaine.

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