Texte de Jacques Oziel, photos de Jacques Oziel, Thierry Jagle, Olivier Detrait, et Michel Adnet
Un spotter c’est quoi ?
Spotter est le terme utilisé aujourd’hui pour désigner le passionné d’aviation parcourant les aérodromes et les meetings aériens pour photographier, répertorier mais surtout admirer ces belles machines qui font partie du patrimoine aéronautique mondial. Il est en quelque sorte l’ambassadeur du monde de l’aviation à travers les photos inédites qu’il saisit et qu’il partage, soit sur un blog, les réseaux sociaux, ou de manière plus conventionnelle, dans un club photo.
C’est aussi pour lui l’occasion de retrouver ses homologues passionnés dont certains sont devenus de véritables amis.
Le spotter est en général à la recherche du modèle rare qu’il cherche à être le premier ou la première à mettre « dans la boîte ».
L’association Spot’Air a suivi un de ces passionnés lors d’un évènement aéro, et non des moindres, celui des 70 ans de la Patrouille de France. Ce meeting organisé par la FOSA s’est tenu entre le 19 et le 22 mai dernier sur la base aérienne 701 « Général Pineau » de Salon de Provence.
Le bon spotter est prévoyant
J., que nous nommerons ainsi, nous donne rendez-vous devant l’entrée de la base ce vendredi à 6 heures. Cette journée est spéciale, puisque la BA 701 n’est ouverte qu’aux spotters pour assister aux répétitions. Environ 650 passionnés de la photo aérienne sont attendus ce vendredi.
Le temps est gris et le fond de l’air plutôt frais. La météo prévoit des averses dans le courant de la journée, et le plafond nuageux est assez bas. Qu’à cela ne tienne, J. a prévu son équipement spécial mauvais temps. Chapeau à larges bords, long poncho et chaussures imperméables et aérées. Il en va de même pour son matériel photo, bien ô combien précieux ! Tout est protégé dans son sac à dos étanche et, nec plus ultra, un manteau protecteur étanche pour son boîtier et ses objectifs. Zeus, dieu grec du ciel et de la pluie, peut bien se tenir et faire preuve d’inventivité pour le décourager. J. est paré pour la journée !
Une fois passé le filtrage mis en place par le personnel de la base, il endosse sa chasuble « photographe » et son badge « Spotter » autour du cou. Le précieux sésame lui permettra d’accéder à des zones habituellement inaccessibles. Le personnel d’encadrement invite les premiers spotters dont J. fait partie, à embarquer à bord du bus. Direction la zone du statique où les avions sont parqués en attendant l’heure des premiers décollages et des évolutions.
Le temps est compté pour J. et ses « collègues du jour » . Les consignes sont données : « Messieurs dames nous avons 25 minutes pour nous rendre sur place, faire quelques prises de vue et revenir au point de départ ». Une fois arrivé sur la zone de parcage des avions, les prises de vue s’enchaînent. Certains se contentent de photographier la « flight line », bel alignement d’avions comme pour les Alphajet de la Patrouille de France. D’autres tentent de prendre la photo la plus originale possible. Les flaques d’eau sur le tarmac ce matin s’y prêtent idéalement pour obtenir un effet bel « miroir » de l’avion qui s’y reflète. Clic clac tout est dans la boîte, retour au point d’accueil.
De l’importance du point de spot
D’un rapide coup d’œil, J. a identifié l’endroit où il sera intéressant de s’installer. Il vise le 1er tiers de la piste en service qui sera la 34 aujourd’hui, tout en évitant une zone de contre-jour. Cet emplacement va lui permettre de photographier les avions au décollage à la mise en puissance. Il pourra aussi capturer les atterrissages, avec en arrière-plan une vue de la tour de contrôle qui ne peut qu’apporter du « cachet » à ses photos.
Commence alors un véritable parcours du combattant, car il n’est pas seul à convoiter cette zone. Il lui faut alors traverser les quelques centaines de mètres jusqu’au point choisi, chargé de son sac à dos, sa chaise pliante, et accessoirement de quoi casser la croûte pour la journée. Le personnel d’encadrement de la base aérienne l’accompagnera lui et les autres participants en prenant soin d’éviter les zones interdites en raison des déplacements d’aéronefs prévus tout le long de cette journée.
En jouant un peu des coudes, J. installe sa chaise et déballe son équipement photo. Ça y est !! la place est devenue « propriété privée » pour la journée. Avant tout, une petite vérification du matériel et des paramètres programmés s’impose compte tenu de la météo du jour. J. jette ensuite un œil sur le programme des arrivées qui avait préalablement été affiché au point de filtrage.
Ce n’est pas pour tout de suite, les premiers aéronefs sont annoncés pour 8 heures, et il n’est que 7h 30. C’est le moment de se restaurer un peu, le petit déjeuner pris à la hâte à l’hôtel à 5 heures est déjà loin.
J. prend ensuite le temps de faire connaissance avec les autres spotters installés à côté de lui. J., comme un de ses voisins est « canoniste », un autre est quant à lui « nikoniste ». Cette hétérogénéité de modèles et de marques permet souvent d’échanger et de comparer les performances des matériels. Mais nous savons que le boîtier ne fait pas tout. Le « caillou », autre terme consacré pour nommer un objectif, a aussi une part importante dans la qualité des prises de vue.
C’est parti pour le show
Pas le temps d’en dire plus, le premier « pointu » apparaît à l’horizon. Un pointu dans le vocabulaire aéro désigne un avion de chasse pour la forme particulière de son fuselage étudié pour optimiser l’aérodynamisme de l’appareil et faciliter sa pénétration dans l’air. Le Dassault Rafale, entre autres, fait partie de cette famille.
Suivront d’autres pointus et les patrouilles dont les Saudi Hawks et leurs BAE Hawk Mk.65 et 65A (comme les Red Arrows). L’équipe de démonstration officielle de la Royal Saudi Air Force (RSAF) se produisait pour la première fois en France.
Pour beaucoup de spotters, la prise de vue très prisée lors d’un meeting est le « fond filé ». Il permet de mettre en valeur un élément en mouvement dans une phote. L’élément principal reste net alors que le reste de l’image (arrière-plan) devient flou à cause du bougé. Le filé fait ressortir l’impression de vitesse et donne une dynamique à l’image. Certains spotters lient la vitesse d’obturation à la focale pour l’effet de filé et recommandent une vitesse moitié moins importante que la focale. Ici la vitesse d’obturation est au 1/60e, mode AF en continu.
Au fil de la matinée, les arrivées se succèdent quasiment sans temps mort. Il est d’ailleurs amusant de voir cet espèce de ballet synchronisé de téléobjectifs ponctué du cliquetis des déclencheurs en mode rafale, suivant l’avion en approche jusqu’au touché des roues quelques dizaines de mètres plus loin sur la piste. Puis dans un même mouvement synchronisé, les têtes se baissent sur les boîtiers pour apprécier le rendu des prises de vue et apporter quelques corrections pour les suivantes.
Retrouvez la suite de cette article dans la 2e partie !
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