Un shooting photo inédit et unique

Texte et photos de Maxime Garcia

Un peu d’histoire

Dans le cadre des célébrations du 10e anniversaire du musée, revenons sur quelques faits marquants dans la mise en place de quelques avions appelés à rejoindre le musée. L’idée d’un musée consacré à l’aviation à Toulouse date depuis les années 1980.
En 2001, les rumeurs firent même envisager la construction de deux parcs, l’un à Blagnac avec les avions à proximité des usines d’Airbus ainsi que de l’aéroport, et un autre à Lasbordes, en face de la Cité de l’Espace, dans l’espoir de pouvoir réutiliser le bâtiment d’un Leroy Merlin inachevé pour abriter un parc interactif.

Finalement en 2006, le choix du site de Pinot à Blagnac ainsi que le nom du musée, Aeroscopia, sont entérinés. Le bâtiment se situe face à l’usine Jean-Luc Lagardère. C’est là que furent assemblées tous les Airbus A380. C’est désormais le berceau des avions de la famille Airbus A320.
La ferme de Pinot, datant du XVIIIe siècle, servira centre de loisirs des enfants de Blagnac. Après une rénovation, elle deviendra la base pour des associations avec un centre pédagogique, un restaurant et un centre de séminaire.Spot’Air va y obtenir un local et domicilier son siège social.

La naissance d’Aeroscopia

La pose de la première pierre d’Aeroscopia a eu lieu le jeudi 16 juin 2011 en présence du maire de Blagnac, du maire de Toulouse, de la vice-présidente du conseil régional, du directeur général d’Airbus ainsi que des associations, dont l’association Spot’Air.

Il fallait désormais planifier les mouvements des aéronefs devant intégrer le musée. Certains avions appartenant à l’association des Ailes Anciennes de Toulouse, dont les nouveaux locaux jouxtent au musée, nécessitent une mise en place assez aisée de par leur proximité.
Par contre, les gros avions sont positionnés temporairement sur le site d’Airbus à St Martin du Touch. Ils devront traverser les pistes de l’aéroport Toulouse-Blagnac pour rejoindre le musée via un nouveau taxiway reliant le site Airbus de Jean-Luc Lagardère au musée.

Au début était le rêve

Nous sommes en mai 2011, les choses se préparent. Le Concorde F-WTSB (MSN201) quitte la stèle où il stationnait avec la Caravelle F-BTOE à l’une des entrées du complexe industriel de la société Aérospatiale. C’est l’usine Clément-Ader qui assemble les Airbus A330 et A340. Il y était depuis sa fin de carrière. Il rejoindra la station de lavage située au Delivery Center Airbus Henri Ziegler afin de se faire une beauté.

Les Caravelle entrent dans la danse

Les deux Caravelle doivent quitter leur zone de stationnement temporaire. La Caravelle 10-B3, F-GHMU appartient aux Ailes Anciennes de Toulouse (AATs). La Caravelle 12, F-BTOE est propriété d’Airbus Heritage. Elle retrouvera à cette occasion ses couleurs originales Air Inter.

C’est l’occasion rêvée de réunir une dernière fois ces deux appareils devant le hall M62 de St Martin du Touch. C’est le lieu qui les a vu naître. Désormais c’est ici qu’ont assemble les ATR.

Deux appels sont nécessaires. Un créneau d’une heure m’est alloué pour immortaliser cet instant symbolique.

La manip va être simple à mettre en place en accord avec la sécurité Airbus. Il faut que je certifie que j’ai l’habilitation à faire des photos sur le site Airbus. Il faut aussi voir avec ATR et les personnels chargés du tractage des avions. Et tout cela sans que cela perturbe les activités de la zone.

Dès que les machines arrivent sur zone, on organise le positionnement de la F-BTOE profondeur collée au hangar M62 et à 45° pour mettre quasiment nez contre nez la F-GHMU pour avoir un rendu optimal.
Bien évidemment, cette mise en place prend plus de temps que prévu, attire la curiosité de nombreux salariés qui s’interrogent sur ce qui se passe tout en s’approchant des avions et ATR qui met la pression car ils doivent sortir sous peu un appareil du hangar.

De ce fait, il ne me reste plus que 10mn pour prendre mes photos. Plus qu’il n’en faut pour obtenir ce que je voulais et le résultat est à la hauteur de mes attentes.

Le grand jour

En cette matinée du mois de septembre 2011, la rumeur devient grandissante quand l’arrivée, pour un parking temporaire au Delivery Center Airbus, de l’ensemble des “grosses” machines devant rejoindre le musée.
Cinq machines sont annoncées, deux Concorde, deux Caravelle et l’Airbus A300B
L’activité au Delivery Center Airbus est soutenue. On compte la présence de deux Airbus A380. Le premier est un Singapore Airlines (9V-SKT, MSN92) dont j’ai la responsabilité. Le second est un China Southern (B-6139, MSN88). Il y aura aussi plusieurs Airbus A320 et A330.

L’information devient rapidement officielle avec l’arrivée programmée qui permettra à ce train d’avions de rejoindre le parking temporaire sans perturber l’activité du Delivery Center Airbus.
Cet horaire coïncide avec une activité réduite mon A380 SIA me permettant de réaliser quelques prises de vues de cette arrivée massive.

Un instant unique

Quoi de plus merveilleux en visualisant quotidiennement, depuis mon bureau, une ligne d’avions composée d’Airbus A380, A320, A330, deux Concorde, deux Caravelle et un A300B.

Un rêve fou me traverse l’esprit ! Réunir deux Concorde côte à côte une dernière fois avant leur transfert au musée. C’est là que le F-WTSB intégrera l’espace intérieur. Le F-BVFC rejoindra la parking extérieur.
Toulouse a le privilège d’avoir deux Concorde préservés au même titre que le Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget. Le prototype 001 F-WTSS qui a réalisé le premier vol le 2 mars 1969 piloté par André Turcat assisté de Jacques Guignard, Henri Perrier et Jacques Rétif et le F-BTSD exploité par Air France qui a rejoint le musée le 14 juin 2003 en ayant accumulé 12 976 heures de vol accumulées depuis sa livraison, le 26 juin 1978.

La séance photo unique

Une préparation minutieuse du projet s’élabore. Puis nous le présentons aux différents responsables du Delivery Center Airbus. Ils valident instantanément ce moment symbolique.

La zone de prise de vue souhaitée en fonction du créneau et du soleil, qui est de la partie, est bloquée toute la matinée devant le hangar principal.
Deux tracteurs avions sont à ma disposition ainsi qu’une nacelle pouvant s’élever jusqu’à 10m.

A 9h, le tractage du F-WTSB peut commencer jusqu’à la position définie.
Le F-BVFC rejoint rapidement sa position comme convenu.

Quelques ajustements sont nécessaires.

Je suis dans l’obligation d’interrompre momentanément la séance photos en réquisitionnant le soutien du service sécurité Airbus car le nombre de curieux attirés par cette vision devient grandissant et interfère avec mes photos.
La circulation extérieure au site Airbus devient problématique car les passants souhaitent voir ce qui se passe avec deux Concorde.

La séance photo peut reprendre en étant l‘unique photographe de cet événement historique, qui ne reproduira jamais.

S’ensuivent de nombreuses prises de vues à divers niveaux d’élévation, du sol, intermédiaire et en hauteur maximale de la nacelle élévatrice.

Le visionnage des photos au travers de l’écran de mon boîtier atteint largement mes espérances.

Mais le créneau alloué atteint son terme. C’est avec grands regrets que cet instant magique s’arrête.

En plus de 30 de carrière au sein d’Airbus et plus de 40 ans de photos aéronautiques, cette séance photos restera très certainement l’une des plus belles que j’ai pu réaliser.

Le Concorde MSN 201

Le Concorde F-WTSB (201) a effectué son premier le 06 décembre 1973 depuis Toulouse-Blagnac d’une durée de 3 heures dont 43 mn en supersonique. André Turcat étant aux commandes avec Gilbert Defer, Michel Rétif, Henri Perrier et Hubert Guyonnet. Lors du second vol du 14 décembre 1973, il vole à Mach 2.05.
Stocké entre 1982 et 1985 maintenu prêt comme avion de réserve, il effectuera son dernier vol le 19 avril 1985 entre Châteauroux et Toulouse.
Le F-WTSB et son homologue britannique G-BDDG (MSN 202) ne sont jamais entrés en service. Ils permettront d’entreprendre la phase finale de tests et de certification avant la construction de l’avion de production proprement dit.
Les tâches comprenaient la formation du personnel navigant, la vérification des itinéraires, les t

ests d’endurance et le perfectionnement technique, ainsi que le rôle de banc d’essai pour les techniques de production. À la fin des années 1970, les sièges intérieurs en cuir marron « Présidentiel » sont été retirés du Concorde 02 et placés dans la cabine arrière du 201. Ils s’y trouvent encore aujourd’hui. Il a également permis de valider l’intégration du mini-manche qui allait équiper l’Airbus A320.
Sa carrière se terminera avec 909 heures de vol, 423 vols et 247 vols supersoniques.

Depuis, il appartient à l’Académie Nationale de l’Air et de l’Espace créée en 1983 à l’initiative d’André Turcat et de Dominique Baudis, alors maire de Toulouse. Depuis le 11 octobre 2024, le F-WTSB obtient son inscription au titre aux « Monuments historiques ».

Le Concorde MSN 209 :

C’est le 9 juillet 1976 que le Concorde F-BVFC fit son premier vol.
Air France le réceptionne dès août de la même année en devenant le premier Concorde immatriculé chez Air France.

En Janvier 1979, il reçoit une immatriculation américaine N94FC suite au partenariat entre Air France et Braniff Airways en reprenant son immatriculation française originale en juin 1980. Il a accompli deux tours du monde en 1989 et en 1993.

En août 1999, le vol Concorde F-BVFC, vol AF4500, fait partie des trois Concorde avec deux de British Airways à assister à une éclipse totale de Soleil. Le Concorde était le seul appareil civil capable de suivre l’éclipse grâce à sa vitesse supérieure à Mach 2 tandis que l’ombre se déplaçait au-dessus de l’Europe à environ Mach 2,3.
Les trois Concorde ont donc pu rester dans le cône d’ombre de la Lune pendant moins de quatre minutes (pour les BA9091C et BA9099C) à plus de cinq minutes (pour le AF4500)

En août 2000, il restera à New York pendant 3 mois. En effet, les Concorde perdent leur certificat de navigabilité suite au crash de Paris.
Il rentre de New York en septembre 2000. Beaucoup pensaient que ce serait le dernier vol d’un Concorde Air France

Le 27 juin 2003, le vol Air France AF6903 entre Paris Charles De Gaulle et Toulouse sera le dernier vol d’un Concorde d’Air France.
Pour cette occasion, il survole Toulouse dont la célèbre Place du Capitole. Il se pose définitivement vers 10h15 Zoulou (soit 12h15 heure locale)
André Turcat, Michel Rétif et Henri Perrier, qui était de l’équipe du premier vol Concorde en mars 1969, faisaient partie de ce vol, où l’émotion était grande.

Au cours de sa carrière, il aura totalisé 14332 heures de vols, 4358 vols dont 4200 en supersonique.

Les Caravelle

La Caravelle F-GHMU (n°249) a fait son premier vol le 2 avril 1968. La compagnie charter danoise Sterling en prend livraison.
En 1975, elle devient l’avion personnel de l’empereur Bokassa (Centrafrique).
Europe Aero Service (France) la rachètera en 1980. Puis, la compagnie suisse Air City la louera en 1989/90. Enfin, elle reviendra chez EAS.
Elle a rejoint Air Toulouse en 1992 en ayant accumulé durant sa carrière 41 038 heures de vols et 23 027 atterrissages.

La première Caravelle 12 a effectué son premier vol le 29 octobre 1970 et arrêtée de vol en 1991.
Dérivée du modèle 10B3, son fuselage est allongé de plus de trois mètres. Sa masse au décollage atteint 58 tonnes.
La Caravelle 12, F-BTOE, MSN 280 est la toute dernière Caravelle construite.
Au total, douze exemplaires seront construits. Air Inter sera leur principal exploitant . Certaines furent revendues en 1991 à Air Provence et Sterling Airways.

L’Airbus A300B

L’Airbus A300B F-WUAB, appartenant à Airbus Heritage porte les couleurs du prototype d’A300B. En effet, le prototype MSN001 a été démantelé.
Cet avion est un A300B4-203, MSN238. Il réalisera son premier vol le 24 février 1983. Pan American World Airways en prendra livraison le 24 avril 1985 avec l’ immatriculation N210PA. Puis Sempati Air le rachètera. Il portera alors l’immatriculation PK-JIB.
Il sera stocké à Toulouse à partir de janvier 1999.
En vue d’être visitable et ludique, il subit quelques modifications de la première section avec l’installation de vitrages transparents. Ils permettent de voir la structure et les systèmes de l’avion. Les sections suivantes représentent les aménagements de première classe et VIP.

Le parking se remplit bien.

Plusieurs positions avions sont réquisitionnées temporairement en attendant le transfert vers le musée. L’occasion est trop belle pour immortaliser ces instants en sachant que tous ces avions vont bouger au gré des besoins de positions d’avions en phase de livraison.
La position, l’orientation et la lumière de ce mois de septembre me permettent de réaliser de nombreuses vues assez insolites sous des angles de vues particuliers.

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