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Dernier macaronnage sur Alphajet

Texte et photos de Jean-Christophe Lassalle

La formation des pilotes de chasse se sépare de son « Gadget »

Le 16 mars dernier, la BA-120 de Cazaux accueillait le macaronnage des six derniers pilotes de chasse formés sur Alphajet. Cela marque ainsi la fin de 43 années de formation sur ce type d’appareil. Cet avion aura formé près de trois mille deux cents pilotes.

Cette promotion composée de six officiers issus de l’Ecole de l’Air et de l’Espace restera unique. Effectivement, elle aura été la seule à avoir été entièrement formée pendant trois années au sein de l’Escadron d’Entraînement 3/8.

Une Prise d’arme émouvante

Le général de corps aérien Laurent LHERBETTE a présidé cette cérémonie de qualité.

Après avoir passé en revue le dispositif, des remises de médailles ont été décernées aux militaires méritants. Puis la cérémonie de macaronnage a débuté.

Dans son ordre du jour, le Commandant des Forces Aériennes a rendu hommage aux générations de pilotes de chasse et de navigateurs Officiers Systèmes d’Armes qui se sont succédées ici, à Cazaux. Ils ont été formés au sein des différents escadrons d’entraînement 1/8 « Saintonge », 2/8 « Nice » et depuis août 2022, au 3/8 « Côte d’or ». 

« Aujourd’hui une page se tourne, une page importante dans le livre de l’histoire des ailes françaises ». Le Général de corps aérien affirme ainsi l’importance de cette journée.

En effet, non seulement nous assistons à l’ultime promotion de chasseurs brevetés sur Alphajet. Mais c’est aussi l’arrêt pur et simple de 59 années de formation de la filière chasse à Cazaux lorsque les 6 pilotes quitteront la Base Aérienne 120. 

Petit retour en arrière 

L’Armée de l’air reçoit ses premiers Alphajet dès le mois de décembre 1978. Cet appareil entre en service opérationnel le 30 janvier 1979. Il remplacera, au sein des unités d’instruction, le Lockheed T-33 T-Bird, le CM-170 Fouga Magister et le Mystère IV. Pendant toutes ces années, le « Gadget », comme le surnomment affectueusement ses pilotes, a servi sans interruption à la formation opérationnelle avancée de tous les jeunes pilotes français. Il a aussi formé de nombreux pilotes de certaines forces aériennes étrangères.

En statique et à l’arrière-plan de la cérémonie,  un T-33 argenté brille majestueusement. 

« On va le regretter »

Toujours en exposition mais en retrait des six nouveaux pilotes de chasse, la star du jour : l’Alphajet. Enfin sur la droite, discrètement un PC-21 cognaçais laisse apparaître son fuselage comme un symbole du futur de la chasse.

Des membres de la dernière promotion formée sur le T-33, mais aussi de la première promotion formée sur Alpha Jet étaient présents. Parmi eux, le GBA Jean-Marc DALL’AGLIO, premier lâché sur Alphajet. Ce dernier remettra ainsi l’insigne du dernier breveté sur « Gadget ».

« C’est un avion formidable, un jet mythique. Il a un taux de roulis rapide, au décollage il pousse, il monte sans ralentir. On va le regretter » a précisé à l’issue de la prise d’arme, le Lieutenant Thibault, nouvellement macaronné.

Un avion qui a fait son temps

Dorénavant, les futurs stagiaires « chasse » suivront leur formation au sein de l’Ecole de l’Aviation de Chasse située sur la base aérienne 709 de Cognac. La nouvelle monture, le PC-21. Il s’agit d’un turbopropulseur doté d’un « glass cockpit » identique aux chasseurs de 4ème génération et d’un système de simulation embarqué des plus modernes. Il est taillé pour relever les nouveaux défis comme la connectivité et le combat collaboratif. Cette formation modernisée permet également de réduire les coûts. En effet, l’heure de vol d’un Alpha Jet est d’environ 7800 euros. Celle d’un PC-21 1500 euros.

Ces six jeunes militaires ont rejoint l’armée de l’Air et le l’Espace au mois d’août 2017. Ils intègrent l’Ecole de l’Air et de l’Espace de Salon-de-Provence au sein de la promotion « Général Aubinière ». Ils obtiennent avec succès leur diplôme d’ingénieur en aéronautique en juillet 2020, sanctionnant trois années de formation militaire, technique et sportive.

Après une phase initiale en vol à Salon-de-Provence sur SR-20 Cirrus, ils se dirigent à Cognac, afin de parfaire leur formation de tronc commun sur Grob 120. Au terme de cette phase tant redoutée, ils se posent à Cazaux pour la filière « chasse ».

Dans un premier temps leur formation se consacre à la maîtrise de l’Alphajet. Dans un second temps, ils acquièrent les compétences indispensables au pilote de combat. L’obtention du brevet de pilote de chasse tant désiré valide ce parcours.

Présentations dynamiques

A l’issue de la cérémonie et d’une allocution du Général de corps aérien Laurent LHERBETTE, la Patrouille de France profite d’un vol d’entrainement pour réaliser une sortie appréciée de tous.

Puis, le fameux T-33 s’élance à son tour. Sa prestation remarquée a sans aucun doute rappelé certains souvenirs aux anciens pilotes de T-33 présents. Enfin, pour clore ces présentations dynamiques, l’équipe de France militaire de parachutisme a effectué un saut en chute libre pour atterrir sur le tarmac.

L’Alphajet n’a pas dit son dernier mot

Mais le doux sifflement des moteurs Larzac de l’Alphajet n’a pas fini de rugir pour le moment.

Nos six nouveaux pilotes brevetés devront parfaire leurs compétences. Leur transition opérationnelle s’effectuera ainsi sur cet avion au sein du 3/8 Côte d’Or pendant encore quelques mois.

L’escadron poursuit également sa mission principale de plastron, appelée « Agressor » ou « Red Air ».

Il demeure régulièrement sollicité au profit des unités Rafale ou Mirage 2000, restituant ainsi des tactiques de combat air-air aussi bien à portée visuelle qu’au-delà. Même si l’Alpha Jet est dépourvu de radar et d’une avionique moderne, il ne demeure pas moins un redoutable adversaire en combat rapproché, appelé aussi « dogfight ».

Chargée de rayonner en métropole mais également à l’international, la Patrouille de France, un des cinq Ambassadeurs de l’Armée de l’Air et de l’Espace, continuera d’évoluer sur l’AlphaJet. Son remplacement n’est pas encore figé et l’année 2030 est envisagée, sans certitude aucune.

Il reste donc quelques chapitres à écrire avant de tourner définitivement la page de l’Alphajet. 

Spot Air remercie chaleureusement l’Armée de l’Air et de l’Espace ainsi que la Base Aérienne 120 de Cazaux pour l’invitation, mais aussi plus précisément la Capitaine HINGANT pour sa disponibilité.

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